Le projet CUREMA a pour objectif d’évaluer une intervention innovante visant l’élimination du paludisme auprès d’une population éloignée du système de santé.
Cette intervention est complexe et prévoit les actions décrites ci-dessous. La stratégie utilisée pour la proposition de ces actions est un élément clé de l’intervention :

  • Le fait d’offrir l’intervention d’une façon continue “au fil de l’eau”, plutôt que par des opérations “coup de poing”;
  • Le fait de l’offrir sur des points de passage de la mobilité transfrontalière du public cible, en entrée et sortie des sites d’orpaillage, du fait des difficultés (logistiques, administratives, sécuritaires) d’accès aux sites eux-mêmes;
  • Par des professionnels proches de la population ciblée (presque une intervention par des pairs) ;
  • De façon encadrée par une supervision et un accompagnement rapprochés, pour optimiser la qualité et la fidélité de l’intervention.

De quoi s’agit-il?

L’intervention du projet CUREMA comprend un tronc commun (activité d’éducation sanitaire sur le paludisme) et deux modules qui seront proposés aux participants.
Chaque participant répondant aux critères d’inclusion pourra choisir de participer à l’un des modules ou aux deux.

Le module « traitement radical » est constitué d’un traitement ciblant les individus asymptomatiques à risque d’être porteurs de P. vivax.
L’objectif de ce module est de prévenir les rechutes de paludisme et de réduire le nombre d’hôtes humains capables de transmettre le parasite, à cause de reviviscences. Ces reviviscences peuvent avoir lieu à la fois en forêt mais aussi lorsque le porteur revient en zone rurale/urbaine. Le portage asymptomatique du P. vivax, ainsi que ses reviviscences (responsables dans le monde d’environ 80% des accès palustres liés à cette espèce) sont en effet souvent responsables du maintien ou du réensemencement de la transmission du parasite.
Le “traitement radical” consiste en un traitement par 3 jours de chloroquine associé à 7 jours de primaquine ou 1 dose unique de tafenoquine.  

Le traitement radical peut être proposé aux personnes sortant des sites d’orpaillage ou y planifiant un séjour, indépendamment de la région de provenance/destination.
Les individus à risque seront identifiés à l’aide de critères clinico-épidémiologiques: leur histoire de paludisme récent (confirmé biologiquement ou simplement déclaré, afin de prendre en considération les accès palustres ayant lieu dans les sites éloignés des services de santé), leur exposition à des zones de forte circulation au cours de la dernière année. La présence de contre-indications au traitement proposé sont aussi explorées afin de définir l’éligibilité effective du participant à recevoir le traitement.
Ces informations sont récoltées par le biais d’un questionnaire d’inclusion (antécédent d’évènement indésirable ou intolérance connue, antécédents psychiatriques graves) et de tests rapides réalisés sur le lieu d’inclusion (test de grossesse, évaluation semi-quantitative du taux d’activité G6PD par l’appareil SD Biosensor).

Les participants ayant reçu le traitement radical, bénéficient d’un suivi des deux semaines suivant leur inclusion (au 3ème jour, au 6ème jour et au 15ème jour). Afin de s’adapter à la mobilité de la population cible, le suivi est proposé sous forme de trois alternatives (pouvant être cumulatives) :

  • un suivi présentiel dans les locaux de l’étude ;
  • par appel téléphonique réalisé par le médiateur ayant assuré l’inclusion ;
  • par une application mobile, spécifiquement conçue pour une collecte de données possible offline, pour assurer le suivi de tous ceux qui se rendent dans des régions isolées dans les jours suivants le début du traitement.

Le module « Malakit » correspond à la distribution, après une formation appropriée, d’un malakit (kit d’autotest et d’autotraitement).
Ce kit permet l’accès à un test et à un traitement de qualité pour les épisodes d’accès palustres symptomatiques qui surviennent dans des situations d’éloignement extrême. Ceci a pour but de:

  • prévenir le risque d’émergences de résistance aux antipaludéens dues à un traitement inapproprié,
  • réduire la durée de contagiosité des accès palustres symptomatiques ayant lieu dans la forêt,
  • réduire le risque de complications du paludisme traité de façon tardive ou incomplète.  

Sont éligibles à recevoir ce module les personnes qui planifient de se rendre au cours du mois suivant dans un site d’orpaillage illégal situé en Guyane française, et, parmi eux, ceux qui ont bien acquis la formation à l’utilisation du kit administrée au cours de l’inclusion.
Ce module est hérité de l’expérience positive du projet Malakit (lien hypertexte aux pages Malakit) qui a été simplifié et amélioré (dans le processus et dans la présentation du kit) grâce au soutien de TDR/WHO et à l’expérience du ministère de la Santé du Suriname.


Un tronc commun d’éducation à la santé portera sur le paludisme : ses causes, les moyens de prévention, les principales différences entre les maladies à P. falciparum et à P. vivax, l’importance d’un traitement complet contre toute forme de Plasmodium sp. Il sera proposé individuellement aux participants, au cours du processus d’inclusion, mais aussi à la communauté vivant ou transitant dans les zones d’étape, par le biais d’activités collectives de sensibilisation.

Quand?

La mise en place de l’intervention a débuté sur le terrain en mars 2023, et est réalisé de façon graduelle dans l’ensemble des sites d’inclusion du projet. Nous prévoyons de poursuivre l’intervention jusqu’à fin septembre 2024.

Où ? 

L’intervention du projet CUREMA est proposée dans des localités habituellement fréquentées par les orpailleurs lors de leurs mouvements en sortie ou entrée des sites d’orpaillage situés en Guyane Française, au Suriname ou au Brésil. Les lieux de l’intervention sont identifiées par un point orange sur la carte ci -dessous.

Pour qui? 

Les conditions pour participer à cette étape du projet CUREMA sont les suivantes:

  • être impliqué dans les activités liées aux activités d’orpaillage (soit avoir travaillé dans le secteur au cours des 12 derniers mois, soit planifier de rentrer dans un garimpo dans le mois suivant)
  • avoir au moins 18 ans,
  • peser plus de 35 kilos,
  • ne pas présenter au moment de l’inclusion de symptômes de paludisme.

La participation à l’intervention pourra être initialement proposée à des personnes ayant ces caractéristiques. Ensuite ils recevront effectivement l’un et/ou l’autre des deux modules en fonction de:

  • Leur souhait
  • Leur éligibilité spécifique au module choisi, investiguée au cours du processus d’inclusion, comme décrit ci-dessus.

Par qui ?

La participation à l’intervention est rendue possible sur le terrain par l’action des “médiateurs“ du projet : il s’agit de professionnels recrutés dans le cadre de l’étude par la Fondation SWOS au Suriname et par l’association DPAC au Brésil, et qui ont comme principale caractéristique leur proximité avec la population d’étude.  Ils appartiennent donc à la communauté liée à l’orpaillage, ou la connaissent de près, et ils habitent dans une des localités de l’étude. Ils ont un profil professionnel proche à celui des agents de santé communautaire impliqués dans la lutte contre le paludisme dans les pays concernés par l’intervention. Au Suriname, grâce à un partenariat entre la Fondation SWOS et le Programme National de Lutte contre le Paludisme, une partie des médiateurs a un temps de travail partagé entre le projet CUREMA et les activités de MSD (malaria service deliverer). Le choix de ce profil personnel et professionnel est motivé par une volonté d’accroitre la transférabilité du projet aux Programmes Nationaux en cas de réussite de la phase expérimentale.

Les médiateurs, avant de débuter leurs activités au sein du projet, ont bénéficié d’une formation “socle” concernant les connaissances de base sur le paludisme et la lutte anti-palustre. Ils ont aussi participé à une formation théorique et pratique de la durée de 3 semaines, leur permettant de maitriser les procédures de l’études et les principes de la recherche en santé.